Des retournements à la conversion
« Naaman, le chef de l'armée du roi d'Aram, était un homme important aux yeux de son seigneur ; (…) Mais cet homme, ce vaillant guerrier, était lépreux.» (2 Rois 5,1-2)
Voilà donc un homme dont la situation est totalement bouleversée : Naaman le puissant devient un paria. C’est bien à coup de renversements que son problème va pouvoir se résoudre, que le lépreux va pouvoir retrouver sa place.
Des petits pour sauver les puissants
Pourtant il n’était pas prêt, il est encore enfermé dans ses schémas, ses convictions. Pour lui le salut, la guérison ne peuvent venir que de ceux qui détiennent le pouvoir, que de ceux qu’il considère comme ses seigneurs. Il va être amené à renverser ses valeurs. Et tous ces bouleversements sont possibles grâce non pas à ceux qui ont le pouvoir, mais à ceux qui servent, à commencer par une toute petite fille.
Elle est au plus bas de l’échelle sociale, elle cumule : enfant, femme, esclave, étrangère, tribu de guerre. Et pourtant, si tout s’oppose à son intervention, rien n’aurait été possible sans elle. La fillette n’a pas peur de parler, elle a l’assurance de ceux qui ont la foi. Cette enfant nous montre que personne n’est trop petit pour agir et faire bouger le monde et les personnes qui nous entourent. Personne n’est trop inexpérimenté pour mettre sa confiance en Dieu, prendre les risques de le proclamer, et venir en aide à ceux qui l’entourent. Elle sait rester humble, mais elle sait également être sans restriction, un témoin lumineux de son Dieu.
Et l’histoire continue (2 Rois 5, 1-19). Naaman se met en route, il est encore dans sa logique de puissance. Il part avec des richesses en profusion. Bien que la fillette l’ait envoyé auprès du prophète, il ne peut envisager de rencontrer un autre personnage que le roi. Et cette rencontre ne manque pas d’humour : le roi est terrorisé en voyant arriver celui qui l’a conquis. Il ne voit là qu’un prétexte à querelle, et pourtant, c’est en étalant son ignorance et son incrédulité qu’il va réagir en énonçant une profession de foi tout à fait orthodoxe : « suis-je donc Dieu pour faire mourir ou pour faire vivre », reconnaissant simultanément sa qualité de simple humain et la puissance de Dieu. Naaman va pouvoir aller à la rencontre du prophète, et c’est encore ses esclaves qui vont lui permettre de guérir, lorsque enfin il accepte de se plonger dans le Jourdain, un cours d’eau qu’il estime minable.
Vous avez dit miracle !
Certains d’entre nous sont sceptiques à l’écoute des récits de miracles. Mais, dans ce récit, quand a lieu exactement le miracle ?
Est-ce quand la petite parle ? Est-ce quand Naaman l’écoute ? Est-ce quand Naaman finit enfin par accepter de se plonger dans le Jourdain ? Est-ce lorsqu’il plonge ? Aucun geste, aucune parole ne précise l’instant du miracle. D’ailleurs quelle est la nature même du miracle ? Est-ce une guérison ou une purification ? Est-ce la peau neuve ou la confession de foi ? Car, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, le général en chef de l’armée syrienne va reconnaître le Dieu d’Israël comme le seul vrai Dieu. Il va découvrir la puissance du Dieu des petits, des laisser pour compte, des vaincus, ce Seigneur, l’Eternel qui est à ses côtés depuis le début.
Nous pouvons garder la question en suspens, lire nos existences à partir de ce questionnement : quel est le miracle ? Où et quand intervient-il ?
Florence Blondon, membre du service régional d’animation biblique